mercredi 16 janvier 2008

Dans la série des métiers d'autrefois : parlementaire

Avant 1958 existait une profession : la profession de parlementaire. Ce job consistait à exprimer ce que Jean Jacques Rousseau appelait la volonté générale, à représenter le Peuple et à voter les lois.
Mais comme dans le journal télévisé de Jean Pierre Pernault, les petits emplois d'autrefois disparaissent...Fidèle à Charles Maurras, de Gaulle se montre ouvertement méprisant à l’égard des parlementaires et des partis politiques dont les divisions seraient selon lui à l’origine de la débâcle de 1940...

Afin de concrétiser ce mépris il réduit considérablement les prérogatives du Parlement.

Tout d’abord il procède à une réduction du nombre de matières relevant de la loi - ce que l’on appelle le parlementarisme rationalisé. Ainsi l’article 34 de la Constitution énumère limitativement les matières relevant de la loi, tout le reste relevant du pouvoir réglementaire, attribut du Gouvernement (article 37) qui ne connaît aucune autre limite. De plus l’article 38 permet au Gouvernement de légiférer par simples ordonnances.

Concernant le pouvoir de contrôle du Parlement, attribut démocratique essentiel, celui-ci est faible : le Gouvernement peut faire voter sa confiance au Parlement sur une simple déclaration de politique générale et non sur un programme détaillé (article 49-1); une loi peut être votée sans débats et sans amendements des parlementaires (article 44-3 et surtout 49-3). Surtout le nombre de commissions parlementaires permanentes, qui contrôlent l’activité gouvernementale, a baissé de manière significative : alors qu’elles étaient 15 en 1946, elles sont aujourd’hui 6.

Le pouvoir budgétaire du Parlement s’est aussi réduit : 10 % seulement du budget est voté par le Parlement: ainsi certaines dépenses - « les services votés » - ne sont pas contrôlées et ne font l’objet d’aucune discussion, elles sont reconductibles automatiquement; par ailleurs la loi organique du 2 janvier 1959 limite aussi le contrôle du Parlement sur le budget.

Ces dérives se sont aggravées par des détails d’organisation : ainsi la loi est strictement encadrée financièrement (article 40); la rentrée des parlementaires se fait au mois d’octobre soit un mois après celle du Gouvernement. Par ailleurs le cumul des mandats réduit les parlementaires à des employés à temps partiel : alors qu’en 1936 35,7 % des députés exerçaient un autre mandat local, en 1988 c’était le cas de 96 % des parlementaires! Comment exercer un contrôle et un travail efficace sans avoir un temps complet à y consacrer? Par ailleurs comment peut-on justifier que dans un pays qui compte officiellement 2,5 millions de chômeurs certaines personnes puissent cumuler 2 ou 3 emplois soit 2 ou 3 salaires? Il est à noter que le cumul des mandats est une spécialité française puisque de nombreuses démocraties européennes prohibent légalement voire constitutionnellement ce type de pratiques.

Enfin d’autres faits ont affaibli le pouvoir législatif par rapport à l’Exécutif : ainsi l’inversion du calendrier électoral (présidentielles précédant les législatives) fait que les législatives ne deviennent qu’une élection d’une armée de petits soldats au service du Général; par ailleurs l’existence du fait majoritaire depuis 1962 - coïncidence entre la majorité au Parlement et le Gouvernement - a engendré une discipline voire une docilité du Parlement vis-à-vis de l’Exécutif.

Il est à noter que l’Union européenne a involontairement creusé ce fossé : 60 % des lois votées par le Parlement ne sont que de simples retranscriptions de directives européennes dont l’origine sont la Commission européenne, dont les membres ne sont pas élus par le Peuple, et le Conseil européen, composé des Exécutifs des Etats européens.

Dans le Contrat social (1762), Jean Jacques Rousseau affirmait que la loi devait être le produit de la Volonté Générale, somme des volontés particulières des citoyens, et devait être du monopole du travail de ses représentants réunis en assemblée. Aujourd’hui la Volonté Générale n’a plus que les sondages et le courrier des lecteurs des médias français pour s’exprimer…

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